Avertissement : ce site n'engage aucun employeur et est établi à titre de chercheur indépendant. Il contient des critiques constructives et ne cherche en aucun cas à dénigrer. Rétablir la vérité n'est pas dénigrer, c'est le devoir du chercheur.
Le projet Chronospédia de F. Simon-Fustier et K. Protassov est un projet développé à partir d'une activité de modélisation 3D d'horloges d'édifice menée depuis 2012 environ par l'atelier de M. Simon-Fustier dans la banlieue lyonnaise et déclinée au travers de la modélisation de l'horloge horizontale de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, de l'horloge d'édifice du château de Vaux-le-Vicomte, de l'horloge électromécanique de l'hôtel de ville de Cluses, des grandes horloges à carillon du palais de Mafra et de quelques autres.
Ce projet a été étendu à partir de 2020 sous l'impulsion de K. Protassov et a maintenant comme ambition de sauvegarder le savoir-faire horloger, essentiellement en ce qui concerne la pendulerie, en s'appuyant sur la 3D, mais aussi en intégrant un certain nombre d'autres types de données.
Cela dit, la motivation première du projet ne semble pas être le patrimoine, ni la recherche sur le patrimoine, puisque les dirigeants du projet n'ont jamais mené de travaux systématiques d'inventaire horloger, ni publié de travaux de recherche sur l'histoire de l'horlogerie ou sur la technique horlogère. Il semble que le patrimoine et la 3D s'insèrent bien plutôt dans une stratégie d'expansion et correspondent avant tout à un modèle économique.
Ayant suivi le projet depuis 2015, j'ai été amené à adopter une attitude assez critique à son égard, notamment du fait des dangers qu'il représente pour les vraies priorités en matière de patrimoine horloger, et du fait du peu de recul des auteurs du projet en matière de 3D.
Dans une précédente version de ce site, j'avais analysé les problèmes du projet sous un certain nombre de facettes, mais il me semble que mes analyses ont été mal comprises. J'avais voulu réaliser des analyses courtes, sur quelques pages, mais cela a multiplié leur nombre, nuisant ainsi peut-être à leur lisibilité.
J'ai donc décidé d'être plus concis, dans l'espoir d'être mieux compris.
Je résume en quelques mots ce que je considère être le danger considérable que représente Chronospédia :
L'une des conséquences des observations précédentes est que le travail de Chronospédia n'est pas durable et en particulier que les différentes modélisations devront un jour être refaites, afin de les rendre véritablement ouvertes et de les soumettre à la critique de la communauté scientifique.
Plus concrètement, les modèles 3D de Chronospédia ne sont pas exempts d'erreurs et bénéficieraient d'une plus grande ouverture. Je vais donner quelques exemples pour le démontrer. Ces observations se basent sur la mise à jour de Chronospédia d'août 2025, laquelle ne propose toujours pas les fichiers source des modèles 3D.
Dans les vues qui précèdent, le pignon de gauche (de la roue d'échappement) n'est pas du tout en contact avec la roue de droite, alors qu'il devrait l'être.
Mais il apparaît aussi que les roues coniques comme celles-ci
sont mal construites, les dents étant simplement adossées à un cone, sans que la roue ait réellement été construite avec ses dents. La roue sans les dents est
et les dents individuelles sont du genre
Ce problème n'est peut-être pas très visible au premier abord, mais la mise en ligne d'août 2025 permet enfin de confirmer ces approximations. Celles-ci sont cependant compréhensibles, car la construction d'une roue conique n'est pas facile. Il faut noter que ce type de construction par collage a encore été utilisé dans une horloge Odobey modélisée vers 2023. Il est possible de faire mieux. La mise à disposition des sources SolidWorks à tous (et pas seulement aux partenaires du projet) permettrait à d'autres de combler les lacunes des modèles.
En observant bien les roues coniques, comme la suivante,
on voit aussi qu'elles ne respectent pas parfaitement celles de l'Encyclopédie. L'équipe de Chronospédia a donné à la roue précédente un profil extérieur cylindrique, alors qu'il n'y a pas de tel profil dans les planches de l'Encyclopédie et que rien n'empêchait de coller à la description de l'Encyclopédie.
Par ailleurs, dans toute la modélisation, de curieuses vis à tête en bulbe fendu ont été employées,
alors qu'elles ne sont pas présentes dans les planches. Les vis que l'on distingue sur l'extrait de la planche ont des têtes hexagonales.
On remarque par exemple à Vaux-le-Vicomte le grand soin apporté à la conception des pièces, un effort de fidélité, et aussi l'emploi de textures, absentes du modèle de l'Encyclopédie.
Dans le modèle de l'Encyclopédie, les vis n'avaient pas de filetage, à Vaux-le-Vicomte elles en ont. Les roues coniques sont mieux construites, ainsi que beaucoup d'autres pièces. Les choses ne sont pas parfaites pour autant. Les paliers de l'arbre du bras d'arrêt de la sonnerie, par exemple, ont l'un des trous qui n'est pas centré. On comprend bien que ce trou n'était pas centré à Vaux-le-Vicomte, du fait du bouchonnage (lui, non modélisé !), mais le positionnement théorique du trou aurait dû être centré. Sur d'autres horloges du même type, il l'est. Ceci pose évidemment la question de la fidélité de la modélisation. Une modélisation doit-elle représenter l'œuvre telle qu'elle devait être, ou telle qu'elle est, après des décennies d'entretien ? Sans doute faudrait-il faire les deux modélisations.
La perte de qualité des modèles en ligne est visible sur certaines pièces, par exemple cette molette :
À gauche, tout a l'air parfait, mais si on regarde de près les crénelures (détail à droite, ce ne sont pas des dents), on s'aperçoit qu'il y a beaucoup d'irrégularités. Les « dents » sont toutes différentes. Bien que le modèle soit de 2015, ce problème est tout récent, puisqu'il résulte de la transformation du modèle SolidWorks en glTF. C'est pour cela que l'on peut dire que les modèles glTF sont dégradés. Ce problème n'est pas anecdotique et aurait pu être évité, mais si personne ne regarde les modèles de près, et, surtout, si personne ne peut regarder les modèles de près, les problèmes de ce genre risquent fort de ne jamais être résolus.
Non seulement la tige inférieure oscille autour d'un point beaucoup trop bas, mais par ailleurs l'élément inférieur de fixation de la lame de suspension est mobile par rapport à la tige, alors qu'il devrait être fixe... Ce genre d'approximation n'est pas tellement digne d'un horloger !
Bien que l'équipe de Chronospédia ait rapidement perfectionné sa maîtrise de SolidWorks, il n'empêche que dans l'horloge Odobey de La Mure, ainsi que dans l'horloge comtoise d'édifice Odobey, toutes deux modélisées beaucoup plus récemment, il y a encore des problèmes. Tous ces problèmes peuvent être corrigés, mais pour qu'ils le soient, il faut davantage d'ouverture, il faut que les modèles complets (SolidWorks et STEP) soient entièrement publiquement accessibles, sans restrictions. La communauté pourra alors participer à l'examen approfondi des modèles, à des discussions sur les modèles, et à leur perfectionnement, ce qui n'est actuellement pas possible.
Pour compléter encore le contexte de l'utilisation de la 3D dans Chronospédia, qui n'a rien de novatrice, on pourra aussi lire :
Le contenu de cette page s'enrichit régulièrement.
Dernière modification : 13 septembre 2025.