Avertissement : ce site n'engage aucun employeur et est établi à titre de chercheur indépendant. Il contient des critiques constructives et ne cherche en aucun cas à dénigrer. Rétablir la vérité n'est pas dénigrer, c'est le devoir du chercheur.
Cette page est consacrée aux deux grandes horloges astronomiques de Passemant, l'une exposée au château de Versailles, l'autre au musée du Louvre. Il s'agit en particulier de donner ici des informations sur l'actualité de ces horloges, sur des travaux en cours, des restaurations, etc. Il s'agit aussi de donner des points de vues différents de ceux soit-disant officiels, qui ne donnent souvent qu'une partie de l'information, et souvent des informations inexactes. Aujourd'hui, la médiation culturelle et la mise en scène priment souvent sur la recherche, au point de la freiner et de condamner certaines recherches à ne jamais être faites.
Le château lui-même, et d'autres sites qui en copient les communiqués de presse (www.my-watchsite.fr, www.newsly24.com, actu.fr, etc.), affirment que « Cette prouesse technique a exigé 36 années de travail. Passemant consacra vingt ans à l’élaboration des tableaux astronomiques et à la conception du rouage dont la fabrication demanda douze ans à l’horloger Dauthiau. Quatre années supplémentaires furent nécessaires à Jacques Caffieri pour réaliser le cabinet de bronze doré, chef-d’œuvre de l’art rocaille. » Bien sûr, 20+12+4=36, mais c'est une fausse comptabilité, avec des périodes qui se recouvrent et des périodes qui n'étaient certainement pas consacrées qu'à cette horloge. Parce qu'une personne a dit cela un jour, faut-il que plus de 200 ans après on continue de perpétuer les mêmes erreurs ?
Ces 36 ans (qui en deviennent quelquefois 35 !) ont la vie dure, et le reportage de 20h sur France 2 le 25 octobre 2022 perpétue cette fausseté.
Le château indique que « que la succession des vingt-neuf décans lunaires est représentée en dessous, sur un fond de ciel étoilé » et pourtant il n'existe rien de tel que des « décans lunaires ». Un décan est une période de 10 jours utilisée en astrologie, sans rapport avec ces « vingt-neuf décans lunaires » qui sont en fait simplement 29 phases de la lune, ou mieux, 29 âges de la lune. Ce genre d'affirmations totalement aberrantes est le fait d'amateurs, d'historiens ou encore de conservateurs qui ne connaissent pas les rudiments de l'astronomie ou de l'horlogerie astronomique. Les horlogers peuvent aussi commettre de telles erreurs, puisqu'un horloger, sauf rares exception, est rarement versé dans l'astronomie. (On pourrait paraphraser la conservatrice Hélène Delalex (Le Midi Libre, 19 décembre 2021) et dire qu'on lit des choses ahurissantes de fausseté sur les pendules de Passemant).
D'autres sites qui reprennent cette description insensée sont www.my-watchsite.fr, www.pariszigzag.fr, www.newsly24.com, actu.fr, etc.
On peut se demander quelle est la source de ces « 29 décans ». Comment a-t-on pu arriver à de telles bêtises ? En fait, il apparaît que l'information ne vient sans doute pas de la conservatrice Hélène Delalex, mais plutôt d'un article paru en 2019 dans le numéro 33 de la revue « Château de Versailles ». L'article a pour titre « De l'heure solaire à l'heure légale -- La mesure du temps » (pages 46-51) et il est signé de Jean-Luc Delpech. M. Delpech est qualifié d'historien, mais d'après sa page linkedin, il est conférencier des musées nationaux depuis 1978. En d'autres termes, je pense qu'il est guide à Versailles. (Franck Ferrand, dans son Dictionnaire amoureux de Versailles, nous livre quelques détails sur ce guide apparemment atypique.)
Maintenant, dans cet article, il y a un nombre considérable d'erreurs et de naïvetés, que je relèverai peut-être un jour, mais pour les décans on a la phrase «...tandis que la succession des vingt-neuf décans lunaires est représentée en dessous sur un fond de ciel étoilé ». En fait, c'est exactement le même texte qu'a repris le château dans ses communiqués de presse. C'est non seulement une citation sans référence, mais c'est une citation vers une information erronée.
Le château, toujours lui, indique que sur l'horloge, « En période d’éclipse, un cache en argent apparaît, précisant si elle sera totale ou partielle ». Mais c'est là encore un phénomène trompeur. Pour que les éclipses soient indiquées, avec un minimum d'authenticité, il faut que les tailles respectives de la lune, du soleil et de la Terre soient respectées. Mais sur l'horloge de Passemant, la Terre est beaucoup trop grande par rapport au soleil et la lune est beaucoup trop proche de la Terre par rapport à sa distance. Dans ces conditions, il est impossible d'indiquer ne serait-ce qu'approximativement les éclipses, leur type (partielle ou totale) et encore moins où elles se produisent. Bien évidemment, des sites comme www.my-watchsite.fr, www.newsly24.com ou actu.fr reprennent ces interprétations erronées, sans y apporter le moindre esprit critique.
Là encore, il apparaît que la source de cette information sur les éclipses est l'article de Jean-Luc Delpech cité plus haut.
C'est Franck Ferrand qui dit que la pendule de Passemant donnait l'heure officielle à tout le royaume de 1750 à 1792 dans son Dictionnaire amoureux de Versailles (2013), ce qui est assez aberrant pour une époque où chaque ville avait son heure et où il n'y avait pas d'unification de l'heure.
Peut-être que ce mythe trouve aussi sa source chez M. Delpech ?
Les conservateurs du château ont heureusement commencé à réaliser en mai 2022 que c'était exagéré.
Certains ont affirmé que la pendule de Passemant avait été conçue pour fonctionner jusqu'en l'an 9999. C'est ce qu'écrit le château. Je ne sais si elle fonctionnera jusqu'à cette date, mais ce qui est certain c'est qu'elle n'a pas été conçue pour cela. L'année est un simple compte-tour et ce n'est pas parce que l'année est sur quatre chiffres que les chiffres doivent aller jusqu'en 9999. De plus, rien n'interdit d'aller au-delà, et d'ajouter un 1 devant, ou un 2, etc., et on pourrait aussi dire que l'horloge a été conçue pour fonctionner ainsi jusqu'en l'an 100000. Ou 1000000. L'horloge a aussi été conçue pour qu'on la remonte. C'est plus facile que de la concevoir pour qu'elle se remonte par elle-même. De la même manière, il est plus facile de concevoir l'horloge pour qu'elle puisse afficher toutes les séries de quatre chiffres que de la bloquer, disons, en 1800.
Mon travail a été publié dans une revue d'horlogerie américaine (essentiellement pour le dater), mais la version actualisée est donnée ci-dessous.
Il sera intéressant, le jour venu, de comparer mon travail à l'étude préalable de 2021 (les deux études sont totalement indépendantes), et de le confronter aux rapports finaux, si tant est que ceux-ci deviennent un jour accessibles aux chercheurs, ce qui est loin d'être sûr.
Inutile de dire qu'aucun conservateur du château de Versailles ne m'a fait le moindre retour sur mon étude. A-t-elle seulement été lue ?
Cette pendule se trouve au musée du Louvre, elle a fait l'objet d'une restauration par l'horloger Marc Voisot, sous la supervision de Frédéric Dassas, conservateur en chef au Département des Objets d'art du Musée du Louvre. M. Dassas est, il faut le préciser, historien de l'art et non expert en technologie horlogère. Cette horloge n'est quasiment pas documentée publiquement et le Louvre refuse de communiquer les rapports de restauration complets.
Cette horloge a été présentée à l'exposition inaugurale du Louvre Abu Dhabi du 21 décembre 2017 au 7 avril 2018 (PDF du communiqué de presse et du dossier de presse). Avant cela, seule une partie de l'horloge avait été restaurée, la seconde partie devant être restaurée au retour de l'horloge. On peut donc penser que la restauration a été achevée courant 2018.
Cette horloge a été exposée à Versailles en 2022-2023, dans le cadre de l'exposition consacrée à Louis XV.
Comme aucune description technique n'a été rendue publique par le Louvre (une description technique, ce sont des photographies détaillées, des plans, des nombres de dents, une nomenclature, des dimensions, une explication précise et complète du fonctionnement, sans simplifications), je n'ai vu comme seule solution pour avoir le détail du fonctionnement de cette horloge que de demander à voir les rapports de restauration. J'avais pu, en 2017, accéder au dossier de cette œuvre au château de Versailles, et ce dossier ne comporte (sans surprise) aucune description technique de l'horloge.
Après avoir demandé l'accès aux rapports de restauration au Louvre, Frédéric Dassas m'a finalement (après plusieurs rappels) donné une référence à consulter au centre de documentation du Louvre. Il était, soit dit en passant, curieux de voir le manque d'enthousiasme du Louvre pour mes recherches, comme si cette horloge n'intéressait pas spécialement le musée du Louvre. En réalité, bien sûr, cette horloge intéresse sans doute considérablement (et c'est sous-estimé) le musée, mais les conservateurs du Louvre font presque comme si c'était une horloge parmi d'autres, justement pour limiter les demandes comme les miennes. En tous cas, j'ai consulté le document signalé par M. Dassas en 2020 et il s'agit d'un unique rapport de 20 pages, non daté, mais probablement de 2017, et décrivant très sommairement la première partie de la restauration. Le centre de documentation ne m'a pas laissé le photographier, ou plutôt, ne m'a pas dit que je pouvais le photographier et je n'ai pas demandé à le faire. J'ai passé deux heures à tout recopier à la main, comme un idiot (alors que ce document est un document administratif communicable). Mais par la suite, après une autre demande et saisie de la CADA, et sans demander explicitement ce rapport de 20 pages, j'ai pu en obtenir une version numérique PDF. Ce rapport ne contient aucune photographie de l'horloge et n'est de manière évidente qu'un résumé destiné à être mis dans une bibliothèque. Le vrai rapport n'a pas été communiqué, mais Frédéric Dassas prétend que c'est tout ce qu'il a. En réalité, il s'avère que ce rapport contient des erreurs de mise en page qui proviennent très certainement de la conversion du document original Microsoft Word en PDF. Le fichier PDF qui m'a été communiqué n'est évidemment pas le fichier numérique source, mais en plus, il n'en conserve manifestement pas la mise en page. Le vrai fichier source est bien sûr en possession de l'atelier Chronos, mais peut-être aussi de Frédéric Dassas.
Après saisie de la CADA, le Louvre m'a aussi indiqué que je pourrai consulter les photographies de la restauration. Je retiens cette proposition, mais je n'irai consulter les photographies que si j'obtiens les rapports complets qui sont plus importants. Par ailleurs, avant d'aller voir des photographies, j'ai demandé à en avoir la liste, demande légitime selon avis de la CADA et à laquelle le Louvre n'a pas répondu (une liste qui est facilement extractable, comme c'est le cas pour une liste de fichiers dans un dossier, est un document administratif public). J'ai aussi besoin de faire des relevés sur les photographies, par exemple de compter des nombres de dents, ce qui nécessite au moins un accès électronique.
Lorsque j'ai signalé au Louvre que j'avais déjà consulté le rapport qui m'a été envoyé, je n'ai eu aucune réponse des juristes Camille Moisan et Sandrine Nédellec. Par ailleurs, j'ai communiqué à ces juristes les rapports de Marc Voisot sur la restauration de l'horloge astronomique de Bernard Joyeux au Musée lorrain de à Nancy via WeTransfer, et ils n'ont pas été téléchargés, preuve que le Louvre ne souhaite pas entrer dans un échange avec moi à ce sujet.
La conservation du château de Versailles m'avait par ailleurs communiqué un devis sur la dorure des bronzes, du même restaurateur, mais ce devis ne m'a jamais été communiqué par le Louvre. D'autre part le rapport reçu de 20 pages mentionne en première page l'existence de deux annexes, d'une part une notice historique et d'autre part un résumé des interventions passées. Ces pièces ne m'ont jamais été fournies, malgré mes demandes. Ce sont là des preuves flagrantes du fait que le Louvre cherche à bloquer l'accès aux rapports de restauration complets.
Enfin, le rapport de 20 pages ne décrivant pas le planétaire, celui-ci fait clairement l'objet d'un autre rapport. Le rapport de restauration de l'horloge du Musée lorrain de Nancy a d'ailleurs une allusion à la pendule de Passemant, qui ne fait pas de doutes sur la réalisation de la seconde partie de la restauration.
Sachant maintenant que
Par ailleurs, le Louvre ne semble même pas intéressé par mes recherches, comme s'il regardait les chercheurs extérieurs de haut ou considérait qu'il ne peut y avoir de chercheurs extérieurs en mesure d'apporter quelque chose aux uvres, alors que j'ai certainement un recul sur les horloges astronomiques beaucoup plus grand que le restaurateur et que je viens de publier un chapitre sur les horloges astronomiques dans un ouvrage de référence. Il y a là quelque chose de suspect.
J'attends donc maintenant (2022) que le Louvre rende accessible ces rapports. Une demande a été faite à Mme Laurence Des Cars, présidente du Louvre et en avril 2022, j'ai déposé une requête en ce sens au Tribunal administratif de Paris.
En date de juillet 2022, la présidente du Louvre maintient que le rapport de restauration m'a été fourni et que ma demande d'un rapport complet est sans fondement.
Il n'y a aujourd'hui que deux possibilités : soit le Louvre n'a produit qu'un rapport de restauration de 20 pages, sur la moitié de l'horloge, et rien sur l'autre moitié, voire a laissé l'horloge seulement à moitié restaurée, soit le Louvre a fait plus et ne veut pas le rendre accessible. Il n'y a pas d'autre possibilité. Dans le premier cas, nous aurions une restauration typique d'un musée d'une république bananière sous-développée, qui justifierait que le Louvre soit privé de son étiquette de Musée de France. Dans le second cas, nous aurions une grave rétention d'informations, une attitude non scientifique et non patrimoniale des conservateurs violant les missions de ce musée. C'est au Louvre de choisir dans quel camp il se situe. Pour moi, pour les raisons évoquées plus haut, il est évident qu'il y a rétention d'informations. Au-delà du cas de la pendule de Passemant, il est pratiquement certain que nous n'avons là que la partie émergée de l'iceberg et que beaucoup d'autres uvres sont dans la même situation et que le Louvre ne rend pas accessibles un certain nombre de rapports qu'il devrait rendre accessibles, notamment dans ce département du musée.
Si le Louvre maintient sa position, les rapports ou informations des rapports de l'horloge de la Création du monde ne pourront pas être rendus accessibles aux restaurateurs de la pendule à sphère mouvante de Versailles, laquelle est sous l'effet des mêmes demandes de communication. Toute information qui filtrera à Versailles donnera lieu à de nouvelles saisines au Louvre.
Dans l'état actuel, cette affaire pose donc sérieusement la question du développement scientifique des œuvres. Un musée sérieux n'a pas à conserver des données techniques sur les œuvres qu'il possède, et il a comme mission de rendre le patrimoine accessible à tous. C'est à la présidente du Louvre de faire en sorte que ces missions soient remplies par tous les conservateurs sous sa direction.
À suivre...
Des précisions sur cette horloge seront prochainement données ici.
Le contenu de cette page va prochaînement s'enrichir.
Dernière modification : 7 décembre 2022.